Autorisations d’urbanisme : la perte de la maîtrise foncière justifie-t-elle le retrait de l’autorisation accordée?
- Chloé Daguerre-Guillen
- 25 juin
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Dernière mise à jour : 26 juin
La CAA de MARSEILLE s’est récemment prononcée sur la question de savoir si la perte de la maîtrise foncière d’une parcelle justifie le retrait -ou le refus- d’une autorisation d’urbanisme.
Rappels
Aux termes de l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme :
Les demandes de permis de construire, d'aménager ou de démolir et les déclarations préalables sont adressées par pli recommandé avec demande d'avis de réception ou déposées à la mairie de la commune dans laquelle les travaux sont envisagés :
a) Soit par le ou les propriétaires du ou des terrains, leur mandataire ou par une ou plusieurs personnes attestant être autorisées par eux à exécuter les travaux (...) »
Aux termes de l'article R. 431-35 du même code :
" La déclaration préalable précise :/ a) L'identité du ou des déclarants (...) ; / (...) La déclaration comporte également l'attestation du ou des déclarants qu'ils remplissent les conditions définies à l'article R. 423-1 pour déposer une déclaration préalable. "
La Cour rappelle qu’il résulte de ces dispositions que les déclarations préalables doivent seulement comporter, comme les demandes de permis de construire en vertu de l'article R. 431-5 du code de l'urbanisme, l'attestation du pétitionnaire qu'il remplit les conditions définies à l'article R. 423-1 cité ci-dessus.
Les autorisations d'utilisation du sol, qui ont pour seul objet de s'assurer de la conformité des travaux qu'elles autorisent avec la législation et la réglementation d'urbanisme, étant accordées sous réserve du droit des tiers, il n'appartient pas à l'autorité compétente de vérifier, dans le cadre de l'instruction d'une déclaration ou d'une demande de permis, la validité de l'attestation établie par le demandeur.
Ainsi, sous réserve de la fraude, le pétitionnaire qui fournit l'attestation prévue à l'article R. 423-1 du code doit être regardé comme ayant qualité pour présenter sa demande.
Toutefois, lorsque l'autorité saisie d'une telle déclaration ou d'une demande de permis de construire vient à disposer au moment où elle statue, sans avoir à procéder à une mesure d'instruction lui permettant de les recueillir, d'informations de nature à établir son caractère frauduleux ou faisant apparaître, sans que cela puisse donner lieu à une contestation sérieuse, que le pétitionnaire ne dispose, contrairement à ce qu'implique l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme, d'aucun droit à la déposer, il lui revient de s'opposer à la déclaration ou de refuser la demande de permis pour ce motif. Il en est notamment ainsi lorsque ladite autorité est informée de ce que le juge judiciaire a remis en cause le droit de propriété sur le fondement duquel le pétitionnaire avait présenté sa demande.
En revanche, la seule circonstance que le pétitionnaire perde, postérieurement à la décision de non-opposition à la déclaration ou à délivrance du permis de construire, fût-ce à titre rétroactif, la qualité au titre de laquelle il avait présenté sa demande, n'est pas par elle-même de nature à l'entacher d'illégalité. Il en est notamment ainsi lorsque, postérieurement à la décision de non-opposition à la déclaration ou à la délivrance du permis de construire, une décision du juge prive à titre rétroactif le bénéficiaire de la qualité de propriétaire du terrain sur le fondement de laquelle il a, au titre du a) de l'article R. 423-1, présenté sa demande.
L’appréciation
La Cour constate que :
si un engagement de cession gratuite de la portion de la parcelle d’emprise du projet correspondant au parc de stationnement aux accès desquels les barrières motorisées objet de la déclaration litigieuse doivent être installées, avait été conclu le 20 décembre 1978 entre la commune et le gérant de la société civile immobilière qui a assuré la maîtrise d'ouvrage de l'ensemble immobilier devenu une copropriété, aucun acte notarié n'est venu entériner l'aliénation effective de cette portion au profit de ladite commune, ainsi que celle-ci l'a confirmé au syndic de copropriété ;
Faute pour cette cession d'être intervenue, le syndicat de cette copropriété disposait, à la date des arrêtés litigieux, d'un titre de propriété, y compris sur cette portion.
Au demeurant, ce n'est que postérieurement au dépôt de la déclaration préalable par la copropriété, que la commune a elle-même engagé une instance devant le juge judiciaire pour faire reconnaître son droit de propriété par la voie de la prescription acquisitive, qui lui été reconnu à compter le 20 décembre 1978 par un jugement du tribunal judiciaire de Draguignan du 25 octobre 2023.
Cette circonstance n'est pas par elle-même de nature à entacher d'illégalité la décision de non-opposition à la déclaration de travaux tacitement obtenue.
Ainsi, et alors qu'aucune manœuvre frauduleuse n'est alléguée, le maire de la commune ne pouvait procéder au retrait de cette décision obtenue par ce syndicat de copropriété, ni davantage opposer un refus à sa déclaration de travaux.